El Desdichado
En panne
Chères amies, Chers amis,
En panne d’inspiration, cela peut arriver de temps en temps, me voilà donc confronté à la page blanche.
Que dire et que partager avec vous à l’occasion de notre billet bimensuel ?
Quelle poésie ?
Et puis voilà, sans trop m’étendre, juste pour le plaisir, je suis reparti dans l’un de mes textes préférés – avec également le «Bateau ivre » d’Arthur Rimbaud – sans doute l’un des plus célèbres poèmes de Gérard de Nerval (1808-1855†), « El Desdichado ».
J’aime son épaisseur, sa capacité à nous plonger dans une forme d’ésotérisme, teinté de romantisme, d’histoire et de modernité. J’aime la force de ces mots, leur puissance évocatrice et je ne peux que vous inviter – pour faire court – à le lire plusieurs fois à voix haute, le déclamer dès le « je » d’entrée, jusqu’au moment où vous aurez le sentiment de l’incarner.
Testez-le aussi longtemps que nécessaire, expérimentez-le, jusqu’à plonger dans la nuit sombre quasi hypnotique du texte, à la recherche de l’amour idéal, impossible quête qu’on se le dise entre nous quand même !
L’apprendre par cœur sera un plus incontestable dans un tel contexte, le restituer lors d’un prochain dîner APPF une récompense pour nous tous.
A vivre et à suivre donc !
Bonne lecture,
Matthieu Jacquillat, Président.
En lire plus sur l’auteur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gérard_de_Nerval
Déclamé par Gérard Philippe : https://youtu.be/x5QjmGCnXNc
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El Desdichado
Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.
Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.
Suis-je Amour ou Phébus ?… Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène…
Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.
Gérard de Nerval – « El Desdichado » – Recueil Les Chimères (1854)
Illustration : Hubert Robert (1733-1808†) – Imaginaire de la Grande Galerie en ruine
