PoèmesHarmonie du soir

Harmonie du soir

Charles Baudelaire (1821-1867), publie « Les Fleurs du Mal » en 1857, l’œuvre principale de sa vie, dont nombre de poèmes seront censurés par Napoléon III au nom de la morale.

Ce poème fait partie du cycle de l’amour des Fleurs du mal: il est l’avant-dernier poème consacré au souvenir de sa liaison avec Mme Sabatier, sur le vertige du sentiment amoureux, qui procure à la fois du plaisir mais aussi de la souffrance.

C’est un faux pantoum*, une forme très rare dans la poésie française qui sera utilisée par quelques poètes comme Hugo, Banville et Verlaine.

J’ai choisi cette poésie afin de célébrer le bicentenaire de la naissance de Baudelaire (8 avril 1821-1867), dont soixante-seize poèmes inédits viennent d’être retrouvés par hasard cette année et publiés! Il me plaît par sa musicalité, l’originalité de sa structure et par la beauté de certains de ses vers: « Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige… »

Bonne lecture!

Anne

* Le pantoum français est dérivé du pantoun malais. Dans une des notes de ses Orientales, Victor Hugo, en 1828, avait le premier, cité et traduit en prose une poésie malaise de cette forme, c’est-à-dire avec la répétition de vers selon un certain ordre, un parallélisme de deux idées se poursuivant de strophe en strophe, sans jamais se confondre, ni pourtant se séparer non plus, en vertu d’affinités mystérieuses.

Harmonie du soir

Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !

Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir ;
Le violon frémit comme un coeur qu’on afflige ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.

Le violon frémit comme un coeur qu’on afflige,
Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige.

Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige !
Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige…
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !

Charles Baudelaire, Les fleurs du mal , Spleen et Idéal, (1857)

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