D’après tout
pas facile…
Le rituel revient de façon régulière : choisir – et donc partager avec vous – une poésie tous les quinze jours !
A l’heure dite, vient donc la fatidique question : mais quel texte choisir ?
Issu de dernières lectures, en lien avec l’actualité, en référence à une date ou à un moment anniversaire de l’histoire, à l’humeur du moment et au doigt mouillé,… pas facile…
Et bien ce mois-ci, j’ai choisi pour vous « D’après tout », recueil que j’aime profondément. Il était depuis plusieurs mois sur ma table de chevet et, il vient de transiter vers ma bibliothèque de poésies (de plus en plus fournie, soit dit en passant !).
A peine échappé, je l’attrape au vol, j’en saisis quelques pages, je me replonge dedans, j’en déguste les titres, relis des passages, encore une fois, de plus et de plus, pour finir par retenir deux merveilleux poèmes de son auteur, Jean Follain.
Fort d’une carrière d’avocat et de juriste, sûrement brillant homme dans son talent d’écriture (une cinquantaine d’ouvrages publiés, de nombreux prix et actes de reconnaissance), Jean Follain est pour moi une importante pierre angulaire, entre la mouvance poétique du surréalisme (avec son florilège de stars, Apollinaire, Breton, Char, Eluard et bien d’autres encore) et l’approche si moderne et libérée de la poésie contemporaine.
Quel auteur visionnaire et libre ! Et c’est beau de le voir ainsi à travers ses lignes !
Alors, voici je l’espère pour votre plaisir!
A suivre, nouveau défi dans quinze jours forcément !
Matthieu Jacquillat
Président APPF
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En lire plus sur l’auteur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Follain
Et pour ceux qui veulent le célébrer davantage, suivre le prix remis tous les deux ans en sa mémoire dans la ville de Saint-Lo :
https://lireasaintlo.jimdo.com/prix-follain/
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D’après tout
Force des choses
Croyant entendre frapper
on prend la lampe on ouvre la porte
pour ne trouver que le vent
ce n’est pas le vieil infirme
ni la bête effarée
qui frôlante et tremblante
jouit pourtant d’exister
toutes les fenêtres sont bien fermées.
Beaucoup
refusent le souvenir
mais l’oubli n’est complet jamais.
Saison
Près des souches de chêne
sont les marques de pas
d’un robuste fuyard
sous le ciel de jadis
la châtaigne éclate
sous la cendre d’hiver
les métamorphoses
épuisent les jardins
voir le pain fait rire
l’enfant des misérables
mais celui des riches
sourit à l’arc-en-ciel
sa mère en robe mauve
le tenant par la main
ils marchent tous les deux
vers l’horizon qui s’ouvre.
Recueil « D’après tout » – Jean Follain (1903-1971†)
Editions Gallimard – 1967